Qu’il s’agisse de sport de haut niveau ou de tout autre type de projet, l’esprit d’équipe reste l’un des soft skills les plus importants pour un groupe. Mais le fait d’être plusieurs n’est en rien gage de succès fédérateur et d’esprit collectif. Alors, au-delà des mots, votre équipe peut-elle gagner, et surtout durer ?
Cette saison sportive s’achève sur deux records majeurs pour les deux sports collectifs les plus internationalisés : le football et le basketball. Si le Real Madrid a conservé sa Champions League (une 1ère dans son ère moderne), les Golden State Warriors ont eux récupéré leur trophée avec un final quasi parfait (16V-1D en playoffs, voir photo en titre). Outre leurs individualités, quel état d’esprit préside à leur succès et comment s’en inspirer, en 5 points.
1. Le meilleur à chaque poste, mais tout le monde contribue à l’effort
Qu’ils soient 5 ou 11 sur le terrain, chaque individu est positionné à l’endroit où il excelle, où il se sent le plus à l’aise avec ses capacités et le plus en phase avec le projet global. Jamais vous ne verrez une équipe demander à chaque joueur d’être bon sur tous les aspects du jeu et ainsi niveler ses capacités vers la médiane. Au contraire, il devra les mettre en exergue, les développer et en faire sa marque de fabrique. Il n’en reste pas moins que le bon joueur doit être adaptable des deux côtés du terrain, avec une vision offensive et une vision défensive du jeu.
Il en va de même avec l’équipe dans le monde de l’organisation (entreprise, administration ou association). Pourquoi vouloir uniformiser les compétences d’un individu en fonction de son titre ou de son grade ? Pourquoi tant tenir à réduire la productivité d’un groupe en moyennant ses capabilités ? L’égalité est-elle véritablement garante d’un bon état d’esprit ou juste un cache-misère pour ne pas essayer de comprendre intrinsèquement les personnes dans ce qui les motive et dans ce qu’elles ont construit comme atouts ?
L’équipe performante est bien celle où chaque personnalité est à sa place, en complémentarité avec les autres.
2. Les moins expérimentés / talentueux doivent grandir en étant associés au (projet de) jeu
Il y a les titulaires, qu’ils soient les plus talentueux ou les plus expérimentés, et il y a les remplaçants. Ces derniers doivent regarder, s’inspirer, apprendre pour progresser. Mais surtout, ils doivent vivre l’expérience réelle du jeu. Ils doivent participer, être au contact du terrain, même pour un laps de temps limité et avec un encadrement pour les sécuriser.
Dans vos équipes, les interactions entre les deux types d’acteurs sont-elles régulières ou sont-ils cantonnés à leurs tâches, tantôt starifiées tantôt dénigrées ? L’organisation « libérée », si elle répond plus favorablement à cet esprit que la pyramidale, n’en est pas pour autant le symbole. Tant que le chef ou que l’expert reste seul à la manœuvre, l’équipe reste une somme d’individus. La clé réside dans l’enrichissement et le transfert de connaissances et de compétences : comment le favorisez-vous et comment mesurez-vous que chacun ait appris quelque chose de nouveau chaque jour ?
3. Les défaites sont une source inépuisable de nouveaux départs
On ne gagne pas à tous les coups certes. Mais le fait de perdre doit avoir une valeur, celle de la construction du chemin. Nos deux équipes remarquables cette année ont aussi connu l’échec, parfois cuisant ou cruel. Mais ils s’en sont relevés car un défi en chasse un autre. Et la non-acceptation de l’échec ou la quête de boucs-émissaires conduit irrémédiablement à l’implosion du groupe, échec ultime.
Certaines entreprises sont allées jusqu’à introduire le culte de l’échec. Ou a minima le fait decélébrer l’échec pour le transformer en apprentissage collectif. C’est souvent une occasion extraordinaire de partager ce qui n’a pas fonctionné pour faire mieux la prochaine fois. Les success stories « magiques » que nous servent les médias sont des histoires pour enfants : la vie n’est pas une pente ascendante linéaire mais bien une succession de pics et de creux, et une forme de darwinisme sépare ceux qui rebondissent de ceux qui s’enfoncent. Avec comme bonne nouvelle que le groupe pourra toujours vous tendre la main pour que vous ne vous enfonciez pas totalement.
4. Ce qui doit être dit doit être dit, mais avec bienveillance et « dans le vestiaire »
Le long fleuve tranquille n’existe pas non plus. Nombreuses sont les équipes qui ont dû régler des comptes en interne pour aligner vision et exécution collectives. Parfois avec fracas. Mais le fait de verbaliser, d’expurger le trop-plein émotionnel reste un moteur. A condition bien sûr que l’équipe soit prête à cela et que le distinguo soit fait entre le vestiaire et l’exposition médiatique.
Dans votre équipe, combien sont ceux qui ruminent, qui absorbent, qui intériorisent… avant d’exploser ou de déprimer une fois rentrés chez eux ? Vous en êtes peut-être ? Rien de grave si vous (vous) poussez pour expliciter ces pensées qui annihilent tout engagement. Pour cela, il convient de se poser calmement pour éclaircir ses idées, pour les agencer, pour dissocier le subjectif (« Untel est méchant avec moi ») de l’objectif (« Untel n’a pas fait ce qui était prévu dans les temps »). Reste ensuite à identifier le contexte approprié (qui, quand, où et comment) pour faire part de ses humeurs, afin qu’elles ne nuisent pas à l’esprit d’équipe.
5. Le coach est le garant de cet esprit d’équipe
Le coach coache, les joueurs jouent. Le leader éclaire et montre la voie, l’équipe réalise et transforme. Et souvent en co-construction. Cela semble simple mais est-ce vraiment le cas au quotidien ? Top-down et bottom-up se rencontrent-ils au centre la matrice ou le déséquilibre est-il destructeur ? L’écoute et le respect mutuels sont-ils véritables ?
Pour faire écho au premier point, si chacun se concentre sur son rôle pour le sublimer, il est nécessaire d’avoir une personne avec une vision globale de ce qui se joue, qui connait les systèmes et sait les ajuster, qui est (relativement) hors du terrain et qui sait observer. Le problème majeur dans l’organisation reste le manque de vision et de réflexivité en raison du trop-plein opérationnel qui empêche souvent la prise de hauteur et de recul pour voir les choses différemment.
>> Alors, êtes-vous partis pour finir premiers ou derniers du classement ?
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